La première et merveilleuse histoire d'Amour du monde

Chapitre VI - L'adolescence - 2ème partie

Première partie

Extrait – pages 90 - 91

Le meilleur moment de la journée, pour moi-même, était lorsque Georges venait me chercher pour rejoindre sa famille sur la plage. Il avait, hélas, perdu son papa d'une angine de poitrine récemment et sa maman, Hélène, amie d'enfance de la mienne, avait bien du mal à surmonter son deuil. Le bon air de la Bretagne, Larmor-Plage, lieu de sa rencontre avec son mari, l'aidaient à reprendre quelque appétit et des forces. Bien entourée par sa propre maman, veuve également, sa fille Denise, amie d'enfance de Julienne, et son fils qui était son second grand amour, elle reprenait petit à petit goût à la vie.

Nous restions pratiquement jusqu'à l'heure du dîner sur la plage et Georges me raccompagnait chez Simone et l'oncle Albert, afin qu'il ne m'arrive rien de fâcheux en route. Un soir, la rentrée se fit avec un décalage et j'arrivai en retard pour le dîner. Mon oncle s'en prit à Georges, lançant des suppositions injurieuses pour lesquelles le vin blanc, absorbé un peu trop copieusement, était sans doute en partie responsable. C'était bien à tort, car Georges était le parfait chevalier servant, pur et sans reproche et notre retard fut expliqué par sa maman le lendemain, mais l'oncle ne voulut rien entendre ! Sans doute par suite de réminiscences de sa propre jeunesse, jugeait-il les autres d'après lui-même.

Toujours est-il, qu'Hélène me raccompagna elle-même les quelques soirs que durèrent encore mon séjour, qui fut le premier et le dernier chez ces parents. S'étant imaginé je ne sais quoi, l'oncle Albert se pensait responsable du pire et avait eu peur des réactions de mon grand-père qui heureusement connaissant Georges et moi-même et confiant dans les dires d'Hélène, me gronda pour le retard, lui qui ne les supportait pas, mais me fit grâce de commentaires pour les suppositions erronées de l'oncle. L'année suivante, ce dernier invita ma cousine Annette qui ne connaissait personne à Larmor-Plage.

Extrait – pages 92 - 93

Je me donnais à fond dans mes études et les notes étaient satisfaisantes. J'avais peu de distractions. Anne-Marie me conviait parfois à une sortie avec deux autres de ses amies sympathiques comme elle-même. J'en étais heureuse, mais refusais souvent sous couvert de devoirs scolaires, mais en réalité, les soucis pécuniaires en étaient la véritable cause. Papa me donnait un peu d'argent de poche, mais bien que je tins très rigoureusement mes comptes, ce dont mon père, qui tenait mal les siens, était très satisfait, c'était bien insuffisant pour suivre les nombreuses et diverses sorties d'Anne-Marie : goûters, séances de cinéma, théâtre, musées, concerts, m'étaient interdits faute de moyens. Ce que j'économisais, servait tout juste à acheter de temps à autre : un rouge à lèvres, une crème de soins, quelques pelotes de laine pour tricoter un pull ou quelques fournitures de couture, plus utiles qu'une sortie. Car j'avais pris l'habitude, pratiquement depuis l'enfance, ayant les conseils de ma grand-mère couturière, de me bricoler des vêtements dans ceux de ma sœur ou de maman, afin de les personnaliser.

La maman d'Anne-Marie n'était pas dupe et parfois elle faisait l'invitation elle-même en me disant : "c'est moi qui te l'offre", mais elle me savait trop fière pour accepter fréquemment. Toutes les familles de "l'escalier" connaissaient nos problèmes familiaux et où ils avaient mené maman sur le plan santé. Cependant, dans l'ensemble, tous étaient discrets et je n'en parlais moi-même jamais, j'avais trop honte de l'attitude de papa.

Extrait – pages 101 – 102

Cet été là, comme les précédents, passé à Vannes chez ma grand-mère avec maman, papa nous y rejoignit et nous annonça que puisque j'avais réussi mes examens, il nous offrait à toutes deux dix jours de vacances à l'hôtel à Larmor-Plage, où maman retrouverait son amie Hélène et moi-même, mon ami Georges, son fils. J'étais ravie, mais me désolais de n'avoir pas de maillot de bains convenable. Je résolus de m'en transformer un, fait de laine jaune, donné par ma sœur. Ayant la poitrine lourde, la laine seule ne me semblait pas assez résistante pour soutenir ces rondeurs et je fixais un vrai soutien-gorge à l'intérieur. Je dois dire que le résultat était assez concluant, mais cela me donnait une poitrine un peu trop provocante pour mon goût et je me trouvais grosse !

Georges avait un copain méridional, un Marseillais à l'accent encore plus chantant que le sien, qui l'avait accompagné cet été là. Georges était breton, mais implanté depuis l'enfance dans le midi où son père, capitaine au long cours de son vivant, avait son port d'attache, il avait pris l'accent de la province d'accueil.

Papa passa deux journées avec nous et invita Hélène, sa famille et ami au restaurant réputé pour son homard à l'Armoricaine. Il était toujours prêt pour des agapes et heureux de pouvoir offrir bonne chair.

Ce furent dix merveilleux jours. Nos parents, je crois, rêvaient d'un mariage entre Georges et moi-même. Je ne lui déplaisais pas, puisque qu'il me comparaît à Liz Taylor, alors la petite fiancée de l'Amérique ! De mon côté, je le trouvais plutôt beau garçon, grand, bien bâti, l’œil gris rieur, gentil, très chevalier servant. Trop pour mon goût cet été là, car ayant mené à bien mes études, je me disais qu'il faudrait peut être que je sois enfin moins sage ! Il voulait être vétérinaire, mais ses résultats ne furent pas ceux qu'il avait escomptés à la fin de l'année scolaire. Il lui fallait repasser le Bac et revoir la question de choix pour l'avenir. Lorsque nous nous séparâmes, nous nous promîmes de nous écrire plus souvent, mais aucun mot, ni geste ne furent exprimés, laissant supposer un quelconque projet d'attachement. Peut être que la présence de son ami Gilbert avait empêché qu'une idylle plus sérieuse ne se noua, ma destinée n'était sans doute pas à ses côtés.

Les vacances passées, je voulus rechercher activement du travail. Je n'avais pas fait le choix de poursuivre plus avant mes études, à tort probablement, en me disant qu'étant donné les difficultés financières de papa, il serait préférable de me mettre rapidement à exercer une activité rentable. Voilà que papa déclara péremptoirement que sa fille n'irait pas travailler n'importe où, qu'il avait une association en vue, toujours la même, qui était comme l'Arlésienne, et que j'allais m'occuper de sa comptabilité.

Me disant qu'après tout, cela me permettrait peut-être de mettre de l'ordre dans ses affaires, j'acceptai cette perspective. Il voulut que je travaille à la maison et me proposa de faire le point sur son compte bancaire. Ce fut notre première friction, car il regardait ce compte avec le débit et le crédit à la façon du banquier et non comptablement à l'intérieur de l'entreprise et ne voulait pas en démordre ! Ce point de vue ne facilitait pas la tenue d'une comptabilité. Je constatais d'ailleurs qu'il tenait juste une sorte de “brouillard de caisse” qui ressemblait à un fourre-tout, mais pas du tout à la comptabilité en partie double que j'avais apprise. Comme cette dernière lui paraissait trop compliquée pour son goût et sa conception des comptes, et qu'il avait des idées très arrêtées et moi aussi, nous convînmes qu'il valait mieux qu'il continu selon ses désirs et à sa façon et que je recherche de mon côté une activité réellement comptable.

RETOUR A LA TABLE DES MATIERES II

Grape vine 1

Copyright by Micheline Schneider Le Brun - Extraits - chapitre VI - L'adolescence 2ème partie

"La première et merveilleuse histoire d'Amour du monde ou Hologrammes de deux VIES humaines pour des Entités Divines"

 

Date de dernière mise à jour : 16/06/2023