Chapitre XXI - Où Dieu frappe à la porte
Deuxième partie
Extrait – page 401 - Où Dieu frappe à la porte !
1977 fut également l'année où j'acquis une série d'œuvres de Pierre Teilhard de Chardin, proposée en dix volumes accompagnés d'un lexique, les termes employés par l'auteur n'étant pas toujours accessibles à l'humble lecteur. Édouard, lorsqu'il me vit commencer cette lecture de longue haleine, me mit au défit de le la lire jusqu'au bout, je l'assurais combien elle était enrichissante et comme j'aimerais que lui-même la lise. Ce à quoi il me répondit, qu'il le ferait si je menais mon entreprise à terme !
-Sortant de l'éducation traditionnelle chrétienne, de l'école religieuse et du catéchisme enseigné à l'après-guerre, lire Teilhard de Chardin fut un bain de jouvence. A la pensée ardue pour moi qui suis loin d'être une lumière, mais je sentis une vraie joie m'envahir lorsque je découvris les neuf premiers tomes, soit Le phénomène humain - L'apparition de l'homme - La vision du passé - Le milieu divin - L'avenir de l'homme - L'énergie humaine - L'activation de l'énergie - La place de l'homme dans la nature - Science et Christ. Si je m'arrêtais à ce stade, malgré le bonheur que me procurait cette lecture, c'est que dès février 1978, notre vie entra dans le début d'un nouveau chaos auquel je ferais référence plus loin...
Extrait – pages -402 – 403 -404
... Quelques mois après le décès de Jux, Ginette, notre chef conditionneuse, nous dit qu'elle avait vu chez un client qui nous achetait des cous de poulets pour son élevage de chiens, une portée de Braque de Weimar qui avait deux mois. Son enthousiasme devant leur beauté nous incita à aller l'admirer, avec la secrète pensée de nous laisser tenter, ce qui ne manqua pas de se produire. Après un premier contact, nous prîmes rendez-vous pour revenir avec Sonia et Sylvie, avec la ferme intention de réserver un chiot. Des noms nous furent proposés et nous devions fixer notre choix sur l'individu avant le tatouage. C'était l'année du N, et nous choisîmes Nelson, en fonction de ses pattes déjà imposantes et de sa morphologie bien charpentée. Édouard disait : “Je le choisis cette fois-ci, moi-même, bien costaud et solide, il sera peut être moins fragile que Jux”.
Les éleveurs nous expliquèrent que le chiot était encore trop jeune pour que nous le prenions tout de suite, qu'il fallait attendre qu'il atteigne au moins deux mois et demi, lorsqu'il serait sevré. Mais bien sur nous étions pressés maintenant que nous avions fixé notre choix. Cependant les fêtes de fin d'année approchaient et nous avions prévu de passer le Noël chez Julienne et Julien dans le midi, et il était hors de question d'y emmener un si jeune chiot qui faisait pipi partout, aussi les éleveurs, très compréhensifs, nous proposèrent-ils de le prendre quelques jours à la maison et puis de le leur ramener pendant notre courte absence, ce que nous acceptâmes avec empressement...
... Dès notre retour à la maison, nous pensâmes au plaisir d'aller chercher notre petit chien chez les éleveurs, ce que nous finies le lendemain.
Notre petit Nelson était très mignon, tout gris avec une tache blanche en longueur sur la poitrine, le dedans des oreilles et l'intérieur de la gueule tout rose, des yeux couleur d'opale et de bonnes grosses “papattes” encore bien maladroites. Les éleveurs nous prodiguèrent tous les conseils nécessaires à une bonne alimentation à base de viande crue de bœuf, légumes et riz, à cuisiner soi-même tant qu'il n'était pas adulte, et nous partîmes munis du carnet de santé et du pedigree de notre “nouvel enfant !”
Extrait – pages - 407 – 408 - Dépôt de bilan
...C'est en février 1978 que les ennuis commencèrent à l'élevage.
Une forte mortalité dans le cheptel s'accentua malgré les vaccinations et soins accoutumés. Il semblait qu'un virus inconnu et ne possédant ni vaccin, ni antidote, se soit introduit en France, en provenance d'Amérique du sud, nous fut-il précisé quelques mois plus tard.
Les volailles survivantes dévoraient les quantités de nourriture habituelles, mais ne grossissaient pas suffisamment, et le poulet n'avait plus la belle allure traditionnelle qui avait commencé à faire sa renommée. Édouard dut acheter à l'extérieur, chaque semaine, un camion de gros poulets vifs, afin de pouvoir calibrer les commandes selon les désirs des clients. Il n'était pas toujours évident d'obtenir un animal de la qualité des nôtres, et cela occasionnait un mécontentement des clients, tout en nous grevant de frais supplémentaires qui augmentaient le prix de revient sans que nous puissions le répercuter. Les règlements de l'aliment étaient échéancés à quatre vingt dix jours et la coopérative qui nous servait dut patienter et accepter des décalages pour le paiement des traites, car les pertes s'accentuèrent de mois en mois !
Bertrand était rentré du service militaire qu'il avait effectué en Allemagne et travaillait avec nous depuis quelques mois comme chauffeur-livreur pour gagner sa vie. Il aurait préféré rester en Allemagne, le mode de vie lui plaisant, mais son père l'avait incité à reprendre ses études, ce dont il avait la capacité, tout en faisant ce travail certains jours de la semaine.
Les vols continuaient. Philippe et Bernard décidèrent de monter la garde plusieurs nuits pour essayer de percer ce mystère. Mais, comme un fait exprès, aucun vol ne se produisirent jamais ou ne furent constatés le lendemain matin de leurs présences nocturnes. L'explication nous vint enfin de la gendarmerie alertée depuis quelques mois et qui avait constaté qu'un des ouvriers portugais vendait de la marchandise en douce avec une complicité au conditionnement. Lorsque nous sûmes qui était affirmativement soupçonné, nous tombâmes de haut, car cette personne avait toute notre confiance et pour donner le change posait elle-même des cheveux de façon “invisible” en travers des portes des frigos, pour contrôler, soi-disant, si personne n'avait pénétré dedans la nuit. Édouard décida de renvoyer l'ouvrier fautif qui écoulait la marchandise, se disant que sans débouché, l'autre personne reviendrait à de meilleurs sentiments. Il était magnanime et choisit délibérément de ne pas lui indiquer que nous avions connaissance de ses agissements. A ce moment-là, il présumait déjà qu'à la cadence où la mortalité se précisait et les pertes de revenus se généralisaient, nous allions vers de tristes perspectives de cessation d'activité à plus où moins long terme et pensait, qu'après tout, puisqu'elle connaissait bien son métier, qu'au moins, elle le continue jusqu'à la fin…
Extrait – pages – 409 – 410
... Voyant nos difficultés croissantes Édouard suggéra à Philippe de lâcher le bateau qui coulait, car une place de représentant se libérait pour lui dans la société familiale de son père, ce que mon fils fit sur l'insistance de son beau-père, en avril 1978 me semble-t-il.
Au point où nous en étions, Édouard mit son chef d'élevage à l'abattoir, ce ne pouvait être pire maintenant. Nos clients juifs nous avaient abandonnés car le travail ne les satisfaisait plus... Nos clients arabes restaient encore, mais l'ardoise s'allongeait. Nos clients anciens nous quittaient les uns après les autres insatisfaits par la marchandise qui ne leur convenait plus. Avant la fin de juillet 1978, nous déposions notre bilan, tout espoir de refaire surface étant perdu. La coopérative proposait aussitôt de reprendre l'affaire dans sa totalité, elle nomma un directeur et me laissa, sans commentaire ni proposition de salaire, prendre en charge la comptabilité pour son compte, pendant que j'effectuais le préavis de trois mois que je devais au titre de cadre dans la SCA afin de terminer les comptes pour le syndic. J'acceptais ce surplus de travail sans rechigner, malgré ma tristesse. Édouard lui, ne remis plus les pieds à l'élevage durant de longs mois, pris qu'il était par son activité commerciale à la SIDAL. C'était mieux pour lui, car tout ce qu'il avait réalisé à bout de bras, partait comme de la fumée ! Il suffisait que j'en sois péniblement le témoin. Je me rendis compte rapidement de l'incapacité du directeur choisit par la coopérative. Il n'était pas souvent présent, gérait les commandes d'aliments, surveillait que les soins fussent bien donnés au bétail, mais n'intervenait en rien, ni à l'abattoir, ni au conditionnement, laissant Ginette appeler les clients, ce qu'elle faisait, en partie seulement, au préalable. Me laissant totalement tenir la comptabilité, j'étais même obligée de lui rappeler les règlements à effectuer, ne pouvant les faire moi-même, étant donné les circonstances. En réalité, pendant plus de deux mois, car j'avais des congés payés à prendre sur les trois mois de préavis que je devais au syndic, je travaillais payée par ce dernier, sur le dos de notre propre société mise en règlement judiciaire le 25 juillet, mais j'effectuais, à l'œil, tout le travail comptable et surveillance des rentrées d'argent des chauffeurs, pour la coopérative...
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Copyright by Micheline Schneider Le brun - Deuxième partie - chapitre XXI - Où Dieu frappe à la porte - Dépôt de Bilan
"La première et merveilleuse histoire d'Amour du monde ou Hologrammes de deux VIES humaines pour des Entités Divines
Date de dernière mise à jour : 12/06/2023